Quelle est la forme constitutionnelle du régime politique en Syrie ?
Quelle est la forme constitutionnelle du régime politique en Syrie ?
Une nouvelle constitution a été adoptée par le référendum du 26 février 2012 (publié au JO le 27 février par le Décret n° 94 de 2012). La Constitution de 2012 se distingue de celle de 1973 par l’absence de toute référence à quiconque force ou parti politique. Ainsi, contrairement à la Constitution de 1973 conférant au Parti Baath (ou Parti Socialiste de la Résurrection Arabe) un rôle primordial dans la vie politique (préambule, art. 8 et 84 de la Constitution de 1973), la Constitution de 2012 constitutionnalise expressément le multipartisme et l’ouverture des institutions de la République (notamment le poste du président réservé jadis au Parti Baath – ou plutôt dont la candidature était présentée par celui-ci (art. 84)) à toutes les forces et tendances politiques (art. 8 de la Constitution de 2012). Toutefois, ce changement majeur n’a pas semblé remettre intégralement en question la nature du régime.
Dans le par. 1 de son 2e art., la Constitution de 2012 a prévu que « le régime de gouvernance dans l’Etat est républicain », sans toutefois donner une qualification exacte de la nature de ce régime. En effet, le régime établi par la Constitution de 2012, et comme il est décrit dans le 3e Partie de la Constitution relative aux pouvoirs semble avoir une nature hybride regroupant à la fois des caractéristiques du régime présidentiel et parlementaire.
L’aspect présidentiel du régime est affirmé par l’importante légitimité présidentielle, mais notamment par les prérogatives très étendues du Président de la République. Celui-ci est élu au suffrage universel direct pour un mandat renouvelable pour un seul autre mandat consécutif (arts. 86, 88). Le Président de la République est le chef du pouvoir exécutif et l’exerce avec le Conseil des ministres (art. 83). Ainsi, il nomme et met fin aux fonctions des membres du gouvernement – le premier ministre (appelé le Président du Conseil des ministres) et les ministres (art. 97). Il détermine en Conseil des ministres la « politique générale de l’État » et « veuille à son exécution » (art. 98). L’exécutif semble en effet être plutôt monosépale en raison de l’absence des pouvoirs propres du chef du gouvernement. Comme dans les régimes présidentiels, le Président de la République Arabe Syrienne détient d’une fonction législative très étendue. Ces fonctions vont même au-delà des celles classiques connues sous les régimes présidentiels. Ainsi, en plus de la promulgation des lois (art. 100), de l’initiative législative – réservé au président et non au premier ministre – et le droit du veto (art. 112), le Président de la République détient d’un pouvoir législatif exceptionnel, faisant de lui un concurrent même du Parlement, voir un second composant du pouvoir législatif. En effet, il a le droit de légiférer en cas de dissolution du Parlement, en dehors des sessions du celui-ci et voire pendant celles-ci en cas « d’extrême urgence » (art. 113). Le Parlement ne peut déroger à ces « décrets législatifs » (ou « décrets lois ») que par une majorité qualifiée, à savoir les deux tiers des membres présents à condition qu’elle ne soit pas inférieure à la majorité absolue des membres composant l’Assemblée parlementaire. L’annulation ou la modification des décrets législatifs en application de cette disposition ne peut en aucun cas avoir un effet rétroactif.
Les caractéristiques parlementaires du régime se manifestent par l’existence des deux techniques de la séparation souple des pouvoirs connues dans les régimes parlementaires, à savoir le droit de dissolution du parlement et le principe de la responsabilité politique du gouvernement. Le Président de la République peut ainsi dissoudre l’unique chambre du Parlement – appelé le Conseil du peuple (art. 111). En cas de dissolution du Parlement, ce qui entraîne la disparition temporaire du pouvoir législatif en raison de l’absence d’une seconde chambre, la fonction législative est exercée par le Président de la République dans les conditions prévues à l’art. 113 (infra). Le gouvernement est politiquement responsable devant le Parlement – il est également responsable devant le Président de la République – (arts. 75, 77 et 121). La mise en œuvre de la responsabilité politique du gouvernement par le vote de la majorité absolue des membres du Parlement oblige ce premier de présenter sa démission au Président de la République (art. 77).