Un extrait de la RMDP II : Femmes dans la Constitution …
Un extrait de la RMDP II : Femmes dans la Constitution …
Il est important pour le LM-DP comme pour sa Revue, la RMDP que ses propositions textuelles et ou doctrinales soient diffusées, accessibles et disponibles non seulement en intégralité sur supports papiers (diffusion autour de la Méditerranée assurée par les Editions Lextenso) mais aussi – en ligne sur ce site Internet – en proposant, depuis 2016, pour chaque ouvrage des extraits conséquents (au moins deux) de chaque nouveau numéro. Merci aux Editions l’Epitoge (Collectif l’Unité du Droit) de permettre cette mise en ligne.
Pour la RMDP II : Droits des femmes & Révolutions arabes, il a été choisi de retenir les deux extraits suivants :
-
Femmes dans la Révolution : questions critiques (Geneviève Fraisse)
-
Femmes dans la Constitution : où en est la constitutionnalisation des droits de la femme? (Rkia El Mossadeq)
Femmes dans la Constitution :
où en est la constitutionnalisation des droits de la femme ?
Rkia El Mossadeq
Professeure à l’Université Mohammed V Souissi, Rabat –Maroc
Membre fondateur du Laboratoire Méditerranéen de Droit Public,
Membre du Collectif L’Unité du Droit
Le glissement du printemps arabe vers un printemps islamique s’affirme. Il pourrait fragiliser les droits de la femme – déjà fragiles – comme il pourrait enfermer les luttes féminines dans la préservation des acquis. Il rend les questions que suscitent les rapports entre femmes et pouvoir constituant plus complexes.
Ces questions n’ont pas seulement trait à la forme, à la représentativité, au fait de savoir si les femmes sont à l’intérieur ou à l’extérieur du pouvoir constituant, productrices ou simple consommatrices des normes constitutionnelles. Ces questions s’étendent au contenu des normes constitutionnelles qui mérite d’être apprécié par rapport à l’universalité des droits de l’Homme et à leur indivisibilité, ces droits au sein desquels la liberté et les droits de la femme acquièrent une place indéniable.
Ce sont là des questions de forme et de substance dont les réponses devraient converger vers le raffermissement de la suprématie constitutionnelle et vers une œuvre constitutionnelle suprême qui s’oppose à la construction du seul masculin et se penche vers la construction de l’humain, qui prend pour fondement les valeurs de la liberté et de l’égalité entre les sexes. En dehors de ce lien dynamique entre les questions de forme et de contenu, l’œuvre émanant du pouvoir constituant, tout en répondant à la logique du masculin, serait fluctuante, frappée de fragilité et dans sa globalité inachevée. Bien plus, elle serait synonyme de la discrétion qui est contraire à l’idée de la constitution elle-même.
Il ne s’agit donc pas par-là de privilégier les questions de contenu des constitutions sur celles de la forme de leur élaboration ou l’inverse. Il s’agit de réfléchir sur la manière de créer un lien dynamique entre les deux dimensions, la forme et le contenu. Certes l’idée de créer ce lien dynamique milite en faveur de l’instauration d’une charte constitutionnelle substantielle[1], favorise la lecture des droits spécifiques de la femme dans leur interaction avec les droits et libertés en général, les moyens de leur protection, sinon avec l’ensemble du texte constitutionnel. Bien plus, l’idée recèle le but de se servir, d’abord, du droit pour révolutionner le droit, pour insérer la production des normes constitutionnelles dans une perspective qui fait que la lutte pour la démocratie et les droits de l’Homme s’intègre dans un processus infini[2] et d’inscrire, ensuite, la définition de l’égalité juridique entre hommes et femmes dans une redéfinition de l’égalité en général et de ses rapports avec la loi. Car l’égalité devant la loi ne doit pas être perçue comme une finalité puisque la loi n’incarne pas la justice dans l’absolu. Elle est plutôt comme le résultat d’un processus historique et des rapports de forces politiques et des luttes pour le pouvoir politique.
Ces questions, partout problématiques, le sont davantage encore dans le contexte qui nous intéresse. Elles le sont surtout qu’elles sont prisonnières de la montée de l’islam politique consacrée par les urnes. En effet, à l’heure de l’élaboration des constitutions, celui-ci, grâce aux mécanismes classiques de la représentation politique, a récolté les fruits des mouvements de contestation qui se sont traduit dans certains cas par des révolutions. En fait les avatars de cet islam politique avaient déjà interprété les préceptes religieux de manière à justifier leur adhésion à la démocratie en tant que procédure, leur recours à la création des partis politiques et la participation électorale aussi bien des hommes que des femmes[3]. L’une des ramifications de cet islam politique s’est aussi installée au niveau de la société civile et des organisations féminines. De fait, pour défendre leurs revendications qui ont trait à la réforme du droit de la famille, les féministes ne sont plus confrontées seulement à des hommes mais bien aussi à des femmes imbues de l’idéologie de l’islam politique[4]. Les divergences entre les sensibilités féminines s’approfondissent tellement que l’égalité n’est plus un idéal partagé mais fragmenté[5].
Au vu de cette consécration de l’islam politique grâce au verdict des urnes, serait-il légitime d’avancer que les questions des rapports entre femmes et pouvoir constituant sont otages des révolutions subtilisées par les islamistes ?
Elles le sont plutôt par les mécanismes classiques de la représentation politique ou plutôt par l’absence de leur réinvention qui fait que, pour la formation de l’instance chargée de l’élaboration de la constitution, le critère de la participation à la révolution a été marginalisé, sinon écarté ou plutôt n’a pas eu lieu. Des catégories sociales, traversées par des courants d’idées diverses, qui ont constitué le socle des mouvements de contestation, sont restées en marge de cette étape constituante qui devrait symboliser et concrétiser par une œuvre constitutionnelle la sortie de l’étape révolutionnaire. Il s’agit des jeunes et des femmes, perçus non pas en tant qu’entités homogènes mais plurielles, voire hétérogènes.
Il ne s’agit pas par-là de justifier la part de l’islam politique dans les cartes électorales issues des consultations populaires qui viennent d’être organisées. Il s’agit de montrer que ce sont ces mécanismes classiques de la représentation politique, alimentés par la fragilité de l’ensemble des droits de la femme et par l’absence de volonté politique, dont l’islam politique s’est bien accommodé, qui expliquent comment nous nous sommes trouvés en face d’« une représentativité » en marge de la diversité des sensibilités féminines (I) et d’un contenu dominé par les limites de l’aboutissement (II).
I. Une « représentativité » en marge de la diversité des sensibilités féminines
La prise en considération de la diversité des sensibilités féminines dans la formation de l’instance chargée d’élaborer la constitution constitue le point de départ de la création du lien dynamique entre les questions de forme et les questions de contenu. Au cœur de ce lien s’installe la réhabilitation du critère de la participation aux mouvements de contestation à la révolution.
Certes, cette prise en considération pourrait paraître rebelle aux mécanismes classiques de la représentation politique, fondés sur les partis politiques, et même aux mesures destinées à corriger la loi de la majorité par la proportionnelle ou à instaurer des mesures de rattrapage tels le quota et la parité. Mais elle ne peut l’être dès lors que ces mécanismes seraient appelés à fonctionner dans leur agencement avec le critère déjà souligné. Par-là, il ne s’agit pas de rechercher un moyen pour évincer les uns ou les autres ou bien même de tendre un piège aux islamistes ou d’aboutir à l’instauration d’une constitution unanimiste. Il s’agit de capitaliser les fruits de la révolution et les intégrer dans la durée en réhabilitant les forces qui ont initié et participé activement aux mouvements de la contestation et à la révolution dans l’étape constituante. Celle-ci étant spécifique, elle implique leur participation pour l’élaboration des grands compromis aptes à régir l’étape post – révolutionnaire. Et dans le cadre de cette hypothèse, si la loi de la majorité intervenait pour trancher les conflits sur des questions qui resteraient en suspens, elle le serait sur cette base de représentation politique rénovée. Autrement, on ne comprendrait pas comment des forces qui ont tenu les chênes de la révolution se trouvent marginalisées, sinon évincées de l’élaboration de l’œuvre constitutionnelle. De ce fait, le risque de sombrer dans le provisoire et le transitoire ne serait pas exclu.
Il est certain que la réinvention des mécanismes classiques de la représentation politique à partir du critère ainsi délimité représente une tâche très difficile sinon très complexe. Mais, au vu des solutions retenues pour l’élaboration des constitutions, qui oscillent entre la désignation et l’élection, une réflexion à cet égard s’impose. En fait, malgré leur diversité, elles sont restées dans l’ensemble, et dans les meilleurs des cas, en deçà de la gestion de la diversité des sensibilités féminines, sans considérer le fait que les femmes ne sont pas une entité homogène et indivisible mais hétérogène. Le groupe des femmes est en effet traversé par des courants d’idées qui divergent sur les questions de l’égalité des sexes, de la liberté et des droits de la personne et ne puise pas nécessairement la légitimité de son existence dans les partis politiques.
Prenons des exemples comme celui du Maroc ou de la Tunisie ou encore de l’Egypte.
Nous pouvons dire, eu égard à la présence des femmes dans l’instance chargée l’élaborer la constitution, que la solution tunisienne, fondée sur l’élection d’une assemblée constituante, a donné lieu à une présence féminine dominée par l’islam politique. La solution marocaine évoque, quant à elle, une présence prisonnière de la nomination par le roi -pratiquement détenteur exclusif du pouvoir constituant dérivé- d’une commission consultative qui s’intègre dans « une stratégie de problématisation technique »[6]. La solution égyptienne, enfin, évoque une présence très réduite des femmes et, nous semble-t-il, otage, d’une part, de l’oscillation entre la désignation et l’élection et, d’autre part, des reculs sur les mesures du quota.
Il ne s’agit ainsi pas d’estomper les différences entre les pays, les avancées des uns par rapport aux autres et le parcours des mouvements des femmes dans chacun d’eux. Il est vrai que le processus libyen ne peut être assimilé à celui du Maroc ou de la Tunisie ou même de l’Egypte et que les expressions des volontés à l’égard de la participation des femmes à l’étape constituante vont jusqu’à leur exclusion[7]. La Tunisie se distingue ainsi en étant, depuis 1956, le dépositaire du code de statut personnel le plus avancé dans le monde arabe. Le discours politique sur la préservation des acquis des femmes, bien qu’il oscille entre la détermination et les promesses, a été l’une des préoccupations de l’instance nationale chargée de la protection des objectifs de la révolution, de la réforme politique et de la transition démocratique créée le 18 février 2011[8]. Le pacte républicain adopté le 1 juillet 2011 et les débats qui ont précédé son adoption en attestent[9].
Ces préoccupations ne rappellent en aucun cas la brutalité avec laquelle le président du conseil national de la transition a annoncé « sa constitution », le lendemain même de la chute de Kadhafi, en déclarant l’application de la chariâ tout en précisant que toute loi la contredisant sur des questions telles que la polygamie et le divorce serait nulle et non avenue !
Ces différences s’étendent à la représentativité au sein de l’instance parlementaire élue[10], bien que dans l’ensemble des cas elle soit restée en deçà de 30 %[11]. Le premier pays à avoir accordé aux femmes un quota de 30 sièges sur 382, l’Egypte en 1979, sera celui qui recourt à son abrogation par décret en mai 2011, à l’occasion des premières élections parlementaires, faisant passer la représentativité des femmes de 12 % en 2009 à 2 % en 2011.
Malgré cette diversité, l’idée de plaider pour une réinvention des mécanismes classiques de la représentation politique dans son interaction avec le critère de la participation au mouvement de contestation et à la révolution s’impose, tout en gardant présent à l’esprit que la problématique qui consiste à savoir si le régime représentatif est démocratique n’est pas récente et ne concerne pas exclusivement les femmes[12].
Dans ce cadre, le processus tunisien paraît, à première vue, le plus démocratique. Tout en renouant avec le choix emprunté en décembre 1955 pour l’élaboration de la première constitution après l’indépendance, le recours à une assemblée constituante élue (décret – loi de mars 2012) dénote bien des particularités. Si les femmes n’ont pas participé à l’élection de la première[13], le 25 mars 1956, elles prendront bien évidemment part à celle de la seconde, le 23 octobre 2011, mais avec l’autre différence qui réside dans l’instauration d’un scrutin de liste à la proportionnelle à un tour avec les plus forts restes et de la parité dans les listes électorales avec alternance entre homme et femme[14] . En effet, l’article 16 du décret-loi du 10 mai 2011 prévoit que « Les candidatures sont présentées sur la base du principe de la parité entre femmes et hommes en classant les candidats dans les listes de façon alternée entre femmes et hommes. La liste qui ne respecte pas ce principe est rejetée, sauf dans le cas d’un nombre impair de sièges réservés à certaines circonscriptions ». Pourtant, cette représentativité à l’assemblée constituante, fondée exclusivement sur les partis et la parité, première dans le monde arabe, n’implique pas les têtes des listes électorales. Sa mise en œuvre montre que 93 % de celles-ci sont restées masculines. Certes, les femmes ont remporté 58 sièges sur 271. Mais la quasi majorité d’entre elles appartient à l’Islam politique, car elle doit sa présence dans l’assemblée constituante aux seconds sièges recueillis par le parti Ennahda. De fait, la présence des femmes est plus ou moins réduite à une entité homogène.
La solution marocaine est davantage limitée, enfermée dans le choix royal qui rappelle le discours du 9 mars 2011 et qui s’intègre, comme déjà précisé, dans « une stratégie de la problématisation technique »[15]. Une commission consultative, composée de 19 personnes dont 5 femmes[16], nommées par le roi en leur qualité d’experts, sera chargée de rédiger le projet de constitution – à remettre au roi dans un délai de trois mois – sur la base des volets qu’il a définis, tandis qu’un mécanisme politique de suivi, composé des chefs des partis et des organisations syndicales, présidé par le conseiller du roi, est créé par ce dernier le 10 mars 2010. Certes, les volets de la réforme visés par le discours royal ne sont pas exempts de références à la femme et aux droits de l’Homme. Mais la marge d’action de la commission consultative, y compris de sa composante féminine, sera délimitée par le caractère consultatif de sa mission et par les tractations avec le mécanisme politique[17]. Bien plus, elle sera contrainte par le fait que le projet de constitution soumis au référendum populaire le 1er juillet 2012, est le fruit de l’exercice du pouvoir constituant par le roi.
Face à ces solutions éprouvées, les réactions féminines sont variables. Elles sont dominées soit par l’enlisement dans la suspicion, la confusion quant à la volonté du constituant de reculer sur les limites dressées à la légalité par la constitution (Egypte), soit par la défense des acquis (Tunisie), soit par l’enthousiasme démesuré (Maroc), là où la quasi majorité des organisations féminines et des droits de l’Homme, toutes tendances confondues, ont adhéré corps et âmes à la rédaction des mémorandums à soumettre à la commission consultative. Cela est dû à l’adhésion à la procédure proposée et à une certaine perception du roi comme le protecteur des droits de la femme, voire un rempart contre l’omnipotence des islamistes.
Il est incontestable que les méthodes telles qu’éprouvées en vue de faire participer les femmes à l’œuvre constitutionnelle, allant de la nomination à l’élection, changeraient profondément si on y intégrait le critère de la participation aux mouvements de contestation et à la révolution et ce, tant à partir des méthodes qui reposent sur l’élection, qu’à partir de celles reposant sur la nomination.
Au Maroc, la mise en œuvre du critère de la participation au mouvement de la contestation aurait bien affecté la représentativité et la commission consultative – dite d’experts – chargée de rédiger le projet de constitution et le mécanisme politique chargé d’assurer le suivi et la concertation. Celle de la première le serait en introduisant en son sein un courant d’experts progressistes, proches des idées du mouvement du 20 février et des partis de gauche – qui n’ont jamais participé au gouvernement – qui l’ont rejoint, au lieu d’être réduit comme il l’est à ceux jugés dans leur quasi majorité conservateurs[18]. Celle de la seconde instance le serait en introduisant en son sein des représentants du mouvement 20 février qui ont effectivement relancé la revendication de la réforme constitutionnelle, des organisations féminines et des droits humains.
Dans le cadre de l’assemblée constituante élue, la mise en œuvre du critère de la participation à la révolution dans son interaction avec les mécanismes classiques de la représentation politique qui reposent sur les partis politiques aurait amené un reclassement des partis en ramenant le soutien, voire la participation des uns et des autres à l’étape révolutionnaire, y compris des islamistes, à ses justes proportions. Cela aurait conduit à un autre usage du quota ou de la parité et réhabilité d’autres acteurs de la révolution tels que la société civile, les jeunes et les femmes indépendamment de leur appartenance politique. Il est vrai que le rôle de la société civile dans la confection de l’œuvre constitutionnelle, à partir de l’instance qui en a officiellement la charge, provoquerait des contestations qui s’expliqueraient par la défense du principe de l’autonomie qui devait régir ses rapports avec l’Etat. Pourtant ce rôle pourrait être justifié par les impératifs de l’étape principalement constituante et qui mérite d’être distinguée de l’étape exclusivement instituante.
Il ne s’agit pas, par-là, de minimiser le rôle des pressions externes à l’instance constituante dans l’élaboration des compromis ou de tendre à des réconciliations qui finiront par asphyxier les opinions minoritaires ou dissidentes. En fait, l’objectif est de se servir des éléments aptes à rendre l’étape constituante créative en prévenant les risques d’un aboutissement qui sera d’avance frappé par ses limites.
II. Un contenu dominé par les limites de l’aboutissement
Bien que les luttes menées par les potentialités féminines pour peser sur le contenu des futures constitutions s’avèrent acerbes et que nous n’ayons pas encore d’échantillons en main, nous pouvons déjà parler des limites de l’aboutissement. L’exemple marocain que représente la constitution de 2011, dont la médiatisation peut largement dérouter l’observateur extérieur et même intérieur, s’intègre dans cette perspective. Mais, tout en espérant que les perspectives contrastées s’imposent, nous pouvons avancer que dans l’ensemble des cas nous nous heurtons déjà aux faiblesses des acquis qui rappellent les constitutions qui se sont succédé depuis les indépendances de ces pays.
La faiblesse des acquis expliquent que les défis à relever concernant l’élargissement du champ de la constitutionnalisation des droits et libertés en général, ceux de la femme en particulier, en les dotant d’une protection constitutionnelle réelle, se heurtent à la fragilité de l’œuvre de la constitutionnalisation dans sa globalité. L’enracinement de la constitution en tant que règle de droit laisse beaucoup à désirer. La gestion des rapports entre le religieux et le politique, entre normes religieuses et normes constitutionnelles complique davantage la tâche. Elle constitue un frein à la constitutionnalisation des droits de la femme – surtout celles afférentes à la sphère privée –, de droits dotés d’une valeur constitutionnelle effective. C’est pour cela qu’il est difficile d’attribuer la faiblesse des acquis seulement à l’absence de volonté politique et à la primauté des luttes pour le pouvoir.
La plupart des constitutions du Moyen Orient ne se contentent pas, à l’instar de celles du Maroc ou de la Tunisie, d’énoncer que l’Islam est la religion de l’Etat[19]. Elles énoncent que la chariâ est source ou la source principale de législation ou encore la source unique de toutes les législations[20], et ceci avec une tendance à enfermer l’Etat dans une seule interprétation. Cette référence implique que les préceptes religieux régissant la situation de la femme et sa place au sein de la famille sont catégoriques. Elle règne derrière l’énonciation de certaines constitutions, comme celle du Koweït de 1962 dans son article 18, où il est écrit que « l’héritage est un droit régi par la chariâ islamique » si bien que l’égalité devant la loi sans discrimination – qu’elle souligne dans l’article 29 –, pour des raisons qui n’excluent pas le sexe, est vidée de tout sens.
Tout ceci pourtant alors que les finalités de la chariâ rappellent qu’un grand penseur musulman comme Allal El Fassi a plaidé pour l’interdiction de la polygamie et du tueur matrimonial[21]. Ces finalités de la chariâ n’excluent pas non plus des interprétations qui, à partir des versets coraniques, plaident pour l’égalité des sexes dans l’héritage[22]. Ces finalités étaient d’ailleurs présentes dans les travaux préparatoires de l’assemblée constituante tunisienne – élue en mars 1956 – avant la proclamation de la république puisque l’interdiction de la polygamie était au cœur du projet de la commission économique et sociale[23]. Si une telle disposition avait effectivement figuré dans la constitution de 1959, celle-ci aurait défié toutes les prévisions et été l’unique dans le monde arabo-musulman.
Mais dans la majorité des constitutions qui font référence à la chariâ comme source de législation, les textes afférents à la femme varient entre deux et trois. La référence y est indirecte, soit à travers la famille considérée comme « la base de la société, fondée sur la religion, la morale et le patriotisme », soit à travers la maternité, l’enfance et la jeunesse, en soulignant « l’engagement de l’Etat d’assurer » leur protection. Certes, la constitution égyptienne, celle de 1971, qui s’intègre dans cette catégorie, dépasse la limite de deux ou trois articles et se distingue par l’énonciation de l’égalité de l’homme et la femme dans tous les domaines. Néanmoins les préceptes de la chariâ lui sont aussi dressés comme limite puisque l’article 11 énonce que « L’Etat assure à la femme les moyens de concilier ses devoirs envers la famille avec son travail dans la société, son égalité avec l’homme dans les domaines politique, social, culturel et économique, sans préjudice des dispositions de la chariâ Islamique ».
Cela ne veut pas dire que dans les constitutions où la référence à la chariâ est absente les articles consacrés à la femme sont plus nombreux et les avancées plus certaines. S’agissant de la Tunisie, le code de statut personnel ne rappelle pas le texte constitutionnel de 1959, qui s’est contenté d’énoncer dans son article 6 que « tous les citoyens sont égaux quant à leurs droits et leurs devoirs. Ils sont égaux devant la loi », mais un texte de loi qui lui est inférieur. Quant au Maroc, les constitutions se sont contentées jusqu’en 2011 d’un seul et même article où l’égalité des sexes est circonscrite dans le domaine politique. D’après l’article 8, « L’homme et la femme jouissent des droits politiques égaux. Sont électeurs tous les citoyens majeurs des deux sexes jouissant de leurs droits civils et politiques »[24]. Certes, par rapport au contexte politique qui les a générés, celui de l’indépendance qui n’exclut pas le rôle de la femme, ces acquis s’intègrent dans le cadre des droits octroyés, soutenus par l’existence d’une volonté politique et d’un courant religieux ouvert assez fort et qui faisait autorité. Pourtant, en dépit de l’évolution du contexte, significative du rôle grandissant de la femme sur le plan économique et social, l’ère de la régression ou plutôt de la stagnation domine. La réactualisation des droits constitutionnalisés n’est plus une aspiration partagée par l’ensemble des acteurs politiques mais l’apanage de la société civile, voire pratiquement des seuls féministes. En fait le chemin parcouru dans leurs luttes pour la liberté et l’égalité indique que leurs revendications ne sont plus enfermées dans la réforme du code de statut personnel. Elles sont multidimensionnelles, politique économique et sociale et culturelle, la citoyenneté étant un tout indivisible.
A l’heure actuelle, nul ne peut contester la visibilité du rôle des femmes dans les mouvements de contestation et les révolutions alors que le passage des droits octroyés aux droits revendiqués, voire arrachés a déjà, depuis des décennies, partout frayé son chemin. Mais le risque de voir cette progression davantage contrecarrée par la montée de l’islam politique, voire par l’ensemble des conservateurs et par la persistance de l’absence de volonté politique n’est pas exclue. Le témoignage d’une femme démissionnaire de l’assemblée constituante égyptienne (commission des droits et libertés) depuis le 25 septembre 2012[25] est significatif. Elle met l’accent sur l’inefficacité des 25 % représentatifs du courant civil et leur « connivence » avec « les salafistes et les frères » s’agissant de l’insertion des droits de la femme dans le projet constitutionnel ou même de la préservation des acquis qui se rattachent aux mesures du quota en les dotant d’une valeur constitutionnelle[26]. Il est vrai que le parcours des luttes féminines varie d’un pays à l’autre et les processus de l’élaboration des constitutions ne sont pas identiques mais la volonté de contourner les droits acquis tout en résistant à leur réactualisation domine partout.
Certes, le processus marocain, jalonné par les pressions féminines et les mouvements de contestation, ne renvoie pas à des négociations sur l’introduction de la chariâ ou sur l’accentuation de sa place dans la constitution[27] à l’instar des processus tunisien ou égyptien. Ces deux derniers exemples sont marqués par les luttes acerbes des féministes soit pour le maintien des acquis en s’opposant à l’introduction de la chariâ dans le texte constitutionnel (Tunisie), soit pour dénoncer et le maintien de la chariâ comme limite à l’égalité et son ancrage dans la future constitution au détriment des engagements internationaux (Egypte). Le processus marocain n’évoque pas non plus des résistances comme celles des féministes tunisiennes contre le projet de l’article 28 qui énonce que « l’Etat assure la protection des droits de la femme, de ses acquis, sous le principe de complémentarité avec l’homme au sein de la famille » ; projet qui vise explicitement le remplacement de l’égalité par la complémentarité[28] alors que « la femme complé-mentaire de l’homme serait exclue de l’Histoire »[29]. Mais quelle que soit sa particularité, qui peut être due au fait que le roi est le commandeur des croyants, la version finale de la constitution de 2011 porte bien le sceau des tractations avec les islamistes ou plutôt avec les partis dont le référentiel islamique, tant sur le plan de l’idéologie que sur le plan du programme, est bien marqué.
C’est pour cela que si nous voulions schématiser certains processus actuels de l’élaboration des constitutions, nous pourrions avancer que, s’agissant de la Tunisie, il est celui des acquis menacés. Et c’est cette menace qu’il y a lieu de négocier. Pour l’Egypte, il est celui des risques ou des chances de basculement. Ceux-ci sont nourris par les propos tenus par président de la république depuis l’annonce des résultats des élections présidentielles, précisant qu’il est le premier chef d’Etat civil, au sens que cet Etat n’est ni religieux, voire théocratique, ni militaire. Pourtant, l’avancée du processus nous permet de soutenir que celui-ci est otage de la volonté de reproduire et de perpétuer la chariâ interprétée comme limite à l’égalité[30]. Pour le processus marocain qui a donné lieu à la constitution de 2011, on peut parler d’aspirations piégées. Les pièges proviennent du fait que l’adhésion au projet constitutionnel des féministes a été telle que leur appel à voter oui a été corroboré par leur participation active à la campagne référendaire, tandis que la réactualisation des droits constitutionnalisés donne l’impression qu’elle n’est pas exempte de la volonté implicite de les mettre au diapason des constitutions du Moyen Orient, là où la chariâ est dressée comme limite aux droits de la femme, voire à l’égalité des deux sexes.
Il est vrai que le qualificatif « d’aspirations piégées » – s’agissant du processus marocain – peut paraître incompréhensible, sinon insensé, devant le nombre de dispositions qui concerne la femme, soit directement et en exclusivité, soit parce que relatives aux deux sexes en usant de l’expression « les citoyennes et les citoyens ». Mais là où l’on croit que le constituant a cédé et que les oppositions se sont aplanies, les restrictions se dressent. Celles-ci sont assorties ou bien de termes vagues où la référence à la chariâ est implicite, sous-jacente, ou bien de l’absence de volonté politique de l’Etat, ou bien des deux à la fois. On s’en aperçoit dès le préambule qui énonce l’engagement de l’Etat de « bannir et combattre toute discrimination à l’encontre de quiconque » pour des raisons qui n’excluent pas le sexe. Si le Maroc doit préciser la réaffirmation de « son attachement aux droits de l’Homme tels qu’ils sont universellement reconnus » – introduite déjà dans la constitution de 1992 et maintenue dans celle de 1996 – par sa volonté d’ « accorder aux conventions internationales dûment ratifiés par lui (…) la primauté sur le droit interne », il doit le faire « dans le cadre des dispositions de la constitution et des lois du royaume, dans le respect de son identité nationale immuable ».
Certes l’article 19 symbolise, d’une part, l’extension de l’égalité des sexes, limitée depuis la constitution de 1962 au domaine politique, vers l’ « égalité des droits et libertés à caractère civil, politique, économique, social, culturel et environnemental » et, d’autre part, la reconnaissance de la parité. Mais s’agissant de l’égalité, il précise qu’elle se fera « dans le respect des dispositions de la constitution des constances du royaume et de ses lois ». La parité, quant à elle, vivement applaudie, ne constitue pas un principe effectif que l’Etat s’engage à garantir dès l’entrée en vigueur de la constitution. Ces exemples, ou plutôt ces manières de répondre aux revendications chères aux féministes, montrent que « la possible remise en cause du droit à l’égalité »[31] qui leur est inhérente n’est pas seulement due au référentiel islamique par le biais d’une interprétation restrictive de la chariâ mais bien aussi à l’absence de volonté politique de l’ensemble des acteurs politiques.
La représentativité féminine de 16, 96 % à la chambre des représentants à l’issue des élections du 25 novembre 2011 et d’une femme sur 31 ministres au gouvernement constitué le 3 janvier 2012 sont des exemples qui expliquent pourquoi les regards sont actuellement tournés vers le sort réservé à la parité après l’entrée en vigueur de la constitution du 29 juillet 2011. Il n’est pas non plus exclu que des problèmes autres surgissent quant à la cohérence entre le principe de la parité (art 19) et la discrimination positive (art 115) relative à la composition du conseil supérieur du pouvoir judiciaire[32]. La protection des droits, assortie de limites vagues, se prête à des interprétations multiples et contradictoires. Certes ce ne sont là que des exemples qui méritent d’être davantage explicités, mais ils montrent d’ores et déjà que la partie la plus fragile dans la nouvelle constitution marocaine est celle relatives aux droits et libertés de la femme. On dirait que ceux-ci sont plus que jamais verrouillés.
Conclusion
Les processus de l’élaboration des constitutions actuelles montrent combien la volonté de construire le masculin à partir de la loi suprême prévaut. De même, l’adhésion aux mécanismes et procédures universels sert souvent à évacuer l’universalité de valeurs comme l’égalité et la liberté, valeurs au cœur desquelles s’installe la citoyenneté dans ses dimensions plurielles. S’agit-il donc d’une sortie honorable de l’universalité en usant de ses propres moyens ?
Contentons-nous de dire que c’est là où réside justement l’impasse dans laquelle s’enlise la constitutionnalisation des droits de la femme. La liberté et l’égalité entre les sexes ne sont même pas élevées au rang d’un projet à réaliser ou d’un idéal à atteindre. Elles sont assimilées, dans un texte constitutionnel supposé être suprême, à une zone de discrétion assujettie aux interprétions et contre interprétations de la chariâ qui, en permanence, remettent en cause la sécurité juridique des femmes.
Or, en croyant avoir eu gain de cause en incorporant ce qui devait constituer à ses yeux un noyau dur, suprême, préexistant, au sein même de la constitution, le constituant a fragilisé non seulement les droits de la femme mais l’œuvre constitutionnelle dans son intégralité. Bien plus, il a fini par implanter en son sein les moyens de la destruction de sa propre suprématie et de sa destruction en tant que tel, l’idée de la discrétion étant incompatible avec l’idée de la constitution. Cette dernière prévaut tant que l’introduction de la chariâ se fait par le biais de sa traduction dans des articles clairs et précis, répondant aux valeurs de l’égalité et de la liberté et appelés à être régis par la constitution en tant que norme suprême. Autrement, la tentative d’instaurer une concurrence des normes et des suprématies à l’intérieur de la constitution transformerait la constitutionnalisation à une vaine entreprise.
Si donc nous avons plaidé pour la réinvention des critères de la participation à l’étape constituante, ce n’est nullement pour justifier un quelconque acheminement vers une suprématie constitutionnelle fragmentée, voire mutilée. Ce n’est nullement non plus pour légitimer la construction de l’exclusion à partir de la loi suprême. C’est pour valoriser la sortie de l’étape révolutionnaire par l’élaboration des compromis constructifs et par l’appropriation des acquis dans une œuvre constitutionnelle tournée vers l’avenir. Car la constitutionnalisation ne devait sous aucun prétexte s’inscrire en marge de l’idée de la constitution.
Octobre 2012
[1] Chevallier Jaques, L’Etat de droit ; Paris, Editions Montchrestien ; 1992 ; Rousseau Dominique, Droit du contentieux constitutionnel ; Paris, Editions Montchrestien ; 1993 ; p 388 et s.
[2] Charvin Robert, Sueur Jacques, Droits de l’homme et libertés de la Personne ; Paris, Litec ; 1997.
[3] El Mossadeq Rkia, « Les islamistes entre la soif de la participation et les résistances à l’intégration », in Annuaire de l’Afrique du Nord ; Paris, CNRS éditions ; 2000 ; 278 et s.
[4] C’est la différence, au Maroc, entre les ripostes contre la campagne pour la réforme du code de statut personnel menée par les organisations féminines en 1992-1993 et celles à l’encontre du projet de plan du projet de plan d’action national pour l’intégration de la femme au développement annoncé par le premier ministre socialiste le 19 mars 1999. Voir à propos du premier cas El Mossadeq Rkia, « Femmes dans le processus de réformes constitutionnelle et électorale », in XVI Congrès mondial de l’Association Internationale de Science Politique ; Berlin, La démocratisation ; 21-25 août 1994. Pour le second, voir El Mossadeq Rkia, « L’égalité un idéal fragmenté ? » in Colloque sur Utopies féministes et expérimentations sociales urbaines ; Mission Egalité – Université de Tours ; 8-9 mars 2006.
[5] C’est pour dire que le seuil d’entente des différentes sensibilités féminines ne peut plus dépasser les droits politiques de la femme ou autres, à l’exception de ceux qui touchent au droit de la famille. Ibidem.
[6] Madani Mohammed, « La réforme constitutionnelle sous le règne de Mohamed IV » in El Messaoudi Amina, Térol Becerra Manuel José (dir.), Le poder constituyente en el mundo arabe ; Universidad Pablo Olavide, Sevilla ; Centre euro-arabe des études juridiques avancées ; 2012 ; p222.
[7] Fédération Internationale des Droits de l’Homme, Quel printemps pour les femmes ; Monde Arabe ; 8 mars 2012.
[8] A propos de cette instance, ben Hamida Mamlouk Charzed, « La Tunisie entre deux républiques : La constitution morte ; vive la constitution » in Le pouvoir constituant dans le monde arabe ; op. cit. ; p.199-201, 205.
[9] Voir texte de pacte (version arabe) interview de Benachour Yadh, président de l’Instance Nationale pour la protection des objectifs de la révolution dans La sentinelle de Tunisie, www.sentinelle-tunisie.com.
Voir aussi les principaux points du pacte républicain, www.lecourrierdelatas.com et Tunisie : adoption d’un « pacte républicain » comme base de la future constitution, www.jeuneafrique.com.
[10] Union parlementaire, Les femmes au parlement en 2011 Regard sur l’année écoulée 2011;www.ipu.org.
[11] Ceci mis à part l’exemple de l’Algérie où le taux de représentativité des femmes a dépassé les 30 % lors des élections législatives du 10 mai 2012 grâce aux mesures de quota introduites par la réforme constitutionnelle de 2008 (art. 31 bis) et sa mise en application par la loi organique de janvier 2012 qui a prévu 20-50 % de femmes dans les listes électorales proportionnellement à la taille de la circonscription.
[12] Ceci rappelle par exemple le thème portant sur « Le régime représentatif est-il démocratique ? » in Pouvoirs ; n° 7 ; 1981.Voir aussi Ardant Philippe, « Les exclus », in Pouvoirs ; n°7 ; op. cit. ; p 47-62, Fraisse Geneviève, « La démocratie exclusive : un paradigme français » in Femmes en politique, Pouvoirs ; n° 82.
[13] Ben Achour Rafaâ, « L’élection de l’assemblée constituante et sa composition », in L’Assemblée nationale constituante ; Colloque du 29-30-31/5/ 1984 ; Association Tunisienne de Droit Constitutionnel ; Publications du Centre d’Etudes de recherches et de publications ; Université de Tunis ; 1986 ; p 39 (en arabe).Voir aussi, Chekir Hafidha, « Les droits politiques de la femme en Tunisie », in Colloque sur La condition de la femme et les différentes formes de discrimination à son égard ; Faculté des Sciences Juridiques Economiques et Sociales Fès & Unesco ; 12-14 mars 1987 ; p 4et 5. (En arabe).
[14] Pour les débats et les controverses sur le mode de scrutin et sur la parité voir : ww.pouruneconstituante.fr . Voir aussi Dridi Mouna, « L’assemblée constituante en Tunisie », in Le pouvoir constituant dans le monde arabe ; op.cit. ; p. 78-79.
[15] Supra, p. 16.
[16] Il s’agit de trois professeures universitaires dont deux constitutionnalistes et une privatiste, une juge et la présidente – à l’époque – de l’organisation marocaine des droits de l’Homme. Leurs répartitions au sein des commissions ne sont pas spécialement faites en fonction des questions spécifiquement féminines.
[17] Infra, p. 22.
[18] Bendourou Omar, « La nouvelle constitution marocaine du 29 juillet 2011 : Le changement entre mythe et réalité », in Revue du droit public ; n° 3 ; 2012 ; p 641.
[19] Alors que la constitution marocaine énonce que « L’Islam est la Religion de l’Etat, qui garantit à tous la libre exercice des cultes » celle de la Tunisie se distingue par l’énonciation que « La Tunisie est un Etat libre, indépendant, souverain. Sa religion est l’Islam, sa langue l’arabe et son régime la République »
[20] Il convient de noter que les constitutions de la première moitié du 20 siècle, à l’exemple de la constitution irakienne de 1925 ou celle de l’Egypte de 1923 ne contiennent une disposition pareille.
[21] El Fassi Allal, L’autocritique ; Caire, Dar Al Kachchaf pour l’impression la diffusion et la distribution, Beyrouth ; Bagdad ; 1966 ; p287-301. (en arabe).
[22] El Jabri Mohamed Abed, La démocratie et les droits de l’Homme, Markaz Diraçat Al wahda Al Arabiya ; Beyrouth-Liban ; 1994 ; 181. (en arabe).
[23] Ce sont les travaux qui ont donné lieu au projet de la monarchie constitutionnelle du 9 janvier 1957. Ce projet ne contient qu’un seul article qui porte sur la famille (art 19) au lieu des trois proposés. Voir : L’Assemblée nationale constituante, Colloque du 29-30-31/5/ 1984, Association Tunisienne de Droit Constitutionnel, Publications du Centre d’Etudes de recherches et de publications, Université de Tunis, 1986, p 248 et261.
[24] Quant à la lecture restrictive de cet article qui a dominé voir El Mossadeq Rkia, La femme et la politique. La représentation politique au Maroc ; Casablanca, Editions Toubkal ; 1990 ; 24-28 (En arabe).
[25] Texte de la lettre de démission dans Alnahar, quotidien électronique égyptien, www.alnaharegypt.com.
[26] Manal Ettaibi dévoile les coulisses de l’assemblée constituante au cours de la réunion avec le Front National des femmes d’Egypte dans Al Ahali, 8/8/212. www.masress.com. Voir aussi son interview du 26/9/2011 dans www.elwatannews.com.
[27] Cela ne veut pas dire que la référence à la chariâ était absente de tous mémorandums des réformes constitutionnelles présentés devant la commission consultative. Celui du parti de l’Istiqlal, qui se distingue du parti de la justice et du développement représentatif de l’Islam politique, insiste sur le fait d’énoncer dans le préambule de la constitution que « les lois ne doivent pas contredire les préceptes de l’Islam, et que la charia islamique est l’une des sources fondamentales de la législation marocaine », texte de mémorandum dans L’opinion ; mardi ; n° 16.388,5/4/2011 ; p 3.
[28] Déclaration du 4 août 2012 par le collectif composé de l’Association des femmes démocrates, l’Association des femmes pour la recherche et le développement, La Ligue tunisienne de défense des droits de l’Homme, La Commission femme de l’UCTT, La Section tunisienne d’Amnesty international et Le Conseil national des libertés.
[29] Fraisse Geneviève, interview dans www.leplus.nouvelobs.com/ contribution.
[30] Supra, p. 21.
[31] Aouchar Amina, « L’égalité entre les hommes et les femmes dans la constitution marocaine de 2011 », in La constitution marocaine de 2011, Analyse et commentaires ; LGDJ, Lextenso éditions ; 2012 ; p. 259 et s.
[32] Il est énoncé qu’ « une représentation des femmes magistrats doit être assurée, parmi les dix membres élus, dans la proportion de leur présence dans le corps de la magistrature ».